Conférence "Qualité de l'air & activité maritime" - 22 mai 2023

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drone piloté depuis un bateau en mer dans le cadre du projet SCIPPER
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Retour sur la conférence du 22 mai 2023

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La place portuaire constitue un enjeu majeur pour l’activité économique et touristique des régions Provence-Alpes-Côte d’Azur et Corse, ainsi que pour la qualité de vie des riverains. Les émissions de polluants associées à cette activité impactent principalement la proximité des ports, mais ont également des conséquences sur la qualité de l’air et le climat à grande échelle. Des actions sont mises en place progressivement. Depuis 2020, la réglementation internationale impose d’utiliser un carburant à basse teneur en soufre. Cette action a permis de réduire la formation de particules secondaires et apporte une amélioration de la qualité de l’air à l’échelle du bassin méditerranéen. D’autres solutions sont travaillées comme le branchement électrique à quai, le gaz naturel liquéfié, le filtre à particules…

Les autorités portuaires, les compagnies maritimes méditerranéennes, les experts de la pollution atmosphérique, les services de l’État, les associations de citoyens et les acteurs territoriaux se réunissent régulièrement depuis 2017, première Journée Méditerranéenne de l’Air – les Ports (JMAP) à Marseille afin d’échanger sur les actions mises en place par les acteurs de l’activité maritime pour améliorer la qualité de l’air et le climat.

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    La collaboration entre les observatoires de qualité de l'air et le monde de la recherche a permis une meilleure connaissance des polluants émis par les activités maritimes. Les grands ports Ajaccio, Bastia, Marseille, Nice et Toulon ont fait l’objet d’études spécifiques dans le cadre de projets européens (SCIPPER et AERNOSTRUM).

    Ce lundi 22 mai, AtmoSud, Qualitair Corse et le Laboratoire Chimie Environnement organisaient une conférence pour présenter les nouvelles connaissances scientifiques portent sur la composition détaillée des panaches des navires, la caractérisation des zones impactées dans les villes-ports et la qualité de l’air dans les ports Corse. Cette matinée, riche en informations et échanges, a regroupé plus de 100 personnes.

    Intervenants :

    • Dominique Robin, directeur d'AtmoSud
    • Barbara D'Anna, directrice de recherche CNRS, Aix-Marseille Université
    • Alexandre Armengaud, responsable de la coopération scientifique d’AtmoSud
    • Gabrielle Pochet, responsable études & modélisation de Qualitair Corse
    • Damien Piga, Directeur relations extérieures et innovation d'AtmoSud

    Des panaches composés de plusieurs polluants, dont un grand nombre de particules ultrafines

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    Quels sont les polluants spécifiques aux navires ?

    Les panaches des navires se composent de différents polluants, spécifiques à la combustion des carburants marins. Ils sont moins raffinés que les carburants terrestres. On retrouve dans ces panaches des particules fines et ultrafines en grandes quantités, des hydrocarbures aromatiques polycycliques, du carbone suie, des oxydes d’azote, des oxydes de soufre et des composés organiques volatils.

    Les particules ultrafines (PUF), dont la taille est principalement autour de 30 nm. Les particules ultrafines sont des poussières invisibles très fines, 100 fois inférieures à celles qui sont règlementées. Ces particules sont si petites qu’elles pénètrent en profondeur dans l’appareil respiratoire et peuvent se retrouver dans le sang, causant des dommages de l’appareil respiratoire & cardio-vasculaire.

    Les Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques (HAP). Ce sont des composés à base de carbone et d'hydrogène qui comprennent au minimum deux cycles benzéniques. Il existe plusieurs dizaines de HAP, à la toxicité variable. Le benzo(a)pyrène est pour l’instant le seul polluant soumis à des valeurs réglementaires. Ces polluants sont présents sous la forme de particules en suspension dans l’atmosphère. Ils sont principalement issus de la combustion de combustibles fossiles tels que le fioul lourd, de bois de chauffage, de déchets verts… Dans les fumées des navires, les principaux HAP retrouvés sont le naphtalène, l’acenaphthène, le diméthylnaphtalène, le phenanthrene…

    Les métaux lourds, présents également sur les particules en suspension. Les principaux métaux retrouvés dans les fumées sont le Nickel (Ni) et le Vanadium (V), que l’on peut utiliser comme des « traceurs » de l’activité maritime.

    Les Composés Organiques Volatils (COV), qui sont une famille de composés regroupant toutes les molécules formées d’atomes d’hydrogène et de carbone comme le benzène (C6H6), le toluène (C7H8) ou le formaldéhyde (CH2O). Ces composés ont un potentiel de réaction dans l’atmosphère pouvant conduire à la formation de particules secondaires. Les COV émis par les navires sont moins réactifs que ceux émis par les véhicules terrestres. Ils contribuent néanmoins à la formation de particules secondaires.

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    Les panaches des navires se composent également de carbone suie (Black Carbon), d’oxydes d’azote (NOx), d’oxydes de soufre (SOx) ainsi que de gaz à effet de serre tel que le CO2.

    Les polluants émis par les navires sont différents de ceux émis par les voitures, en raison de la différence des combustibles et des systèmes de dépollution qui équipent les véhicules terrestres. Cette composition particulière doit donc être prise en compte dans l’évaluation des risques sanitaires.

    L’émission dans l’atmosphère par les navires de composés gazeux réactifs conduit à la formation de particules dites secondaires. La prise en compte de ces nouvelles particules fines formées dans l’atmosphère après l’échappement conduit à multiplier par 2 la masse de particules présentes dans l’air.

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    Focus sur les particules ultrafines émises par les navires

    Le nombre de particules émises par les navires est une des principales problématiques identifiées dans le cadre des études menées sur les ports de la région. L’étude basée sur la mesure de 97 panaches dans le port de Marseille a montré que la combustion de carburant dans les moteurs des navires émettait un nombre de particules de l’ordre de 2x10E+16 particules par kg de fuel brulé, soit 10 000 fois plus important que les véhicules essences norme EURO6 (entre 2 000 et 20 000). Ce chiffre peut atteindre 80 000 lorsqu’il est comparé aux émissions d’un véhicules diesel norme EURO 6 (entre 47 000 et 80 000).

    En 2022, la compagnie La Méridionale a adapté ce système de dépollution sur les cheminées d’un de ces navires, une première mondiale dans le monde du maritime. Cet équipement permet de réduire de plus de 99% les émissions de particules du navire.

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    Quantité d'émission de combustion de carburant marin

    Des impacts à grandes échelles et dans les villes-ports

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    Influence de la pollution maritime à grande échelle

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      Les émissions des navires ont un impact sur la qualité de l’air à grande échelle, au travers notamment de la transformation des gaz émis en particules. La réduction de la teneur en soufre des carburants en 2020 a permis de réduire de l’ordre de 1 µg/m3 la moyenne annuelle en PM2.5 sur les zones littorales, au travers de la réduction des sulfates.

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      SO2 avant et après réglementation de la teneur en soufre
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      Caractérisation des zones impactées dans les villes-ports

      Les émissions des navires ont également un impact sur la qualité de l’air dans les villes portuaires :

      • Les fumées des navires se dispersent tout d’abord en altitude, à la hauteur des cheminées.
      • Les zones de retombées dépendent de l’orientation des vents et sont donc multiples.
      • Les fumées peuvent parcourir plusieurs centaines de mètres avant de retomber au sol.
      • La largeur des panaches est comprise entre 10 m et 100 m.
      • Les impacts des émissions issues de la phase de manœuvre sont de l’ordre de la minute, en raison de la mobilité de la source.
      • Les impacts de la phase à quai sont de l’ordre de la dizaine de minutes, une durée plus longue que celle observée pour la phase manœuvre en raison du temps de stationnement des navires.
      • Le relief et les bâtiments contribuent au phénomène d’interception des panaches.

      L'essentiel

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      • La diversité des navires présents dans les ports, l’intermittence de leur présence et la variation des conditions météorologiques conduisent à conclure que les émissions des navires ont un impact significatif sur la dégradation de la qualité de l’air sur des durées courtes, de l’ordre de la dizaine de minutes. Les zones d’impact durant ces périodes sont très localisées, à l’échelle d’un quartier. Sur ces durées, les panaches des navires peuvent être la source de pollution majoritaire.
         
      • Les concentrations observées à l’intérieur des panaches peuvent être importantes. Pour les particules ultrafines, leur nombre peut atteindre jusqu’à 700 000 particules/cm3. Pour les oxydes d’azote, leur concentration peut aller au-delà de 1 000 µg/m3 en instantanée.
         
      • Concernant l’exposition chronique, leur contribution à la pollution s’ajoute aux pollutions urbaines que sont le trafic routier, les émissions du secteur résidentiel et les activités industrielles. Suivant les environnements, cette pollution peut contribuer de manière significative à la pollution chronique, notamment dans les zones à proximité immédiate des terminaux.
         
      • Les plans d’actions visant à améliorer la qualité de l’air dans les villes portuaires doivent ainsi concerner l’ensemble des sources de pollution afin de répondre aux enjeux mis en évidence par les nouvelles lignes directrices de l’Organisation Mondiale pour la Santé (OMS), parues à l’automne 2021, ainsi que par la révision en cours de la directive européenne règlementant les concentrations des polluants dans l’air ambiant.

      Simulations de panache

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      Les observations faites en un point, par une station de mesure, ne permettent pas de représenter de manière complète les niveaux de polluants émis par les navires. Les zones de retombées sont dépendantes des conditions météorologiques et de l’environnement dans lequel vont se disperser ces fumées. Il est alors nécessaire d’utiliser des techniques numériques avancées pour représenter la dispersion des panaches de fumées.

      Les zones de retombée d’un panache de navire dépendent :

      • Des conditions météorologiques (vitesse et direction des vents, hauteur couche limite)
      • De la topographie de la ville (hauteur des bâtiments, reliefs)
      • De la hauteur de la cheminée des navires (le panache peut être transporté au-dessus des bâtiments, il n’est alors pas observé au niveau du sol et peut retomber dans des zones plus lointaines).

      Pour représenter ces zones de retombées, les ingénieurs d’AtmoSud ont travaillé en collaboration avec plusieurs laboratoires universitaires et ont utilisé des techniques avancées de modélisation, permettant de reproduire la dispersion des panaches à très hautes résolutions.

      Ressources complémentaires

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      Le dossier dans son intégralité est disponible ici

      Dossier_presse_activite_maritime_230522.pdf
      Nuages
      pdf - 24 mai 2023 - 1.57 MB
      Titre
      Dossier conférence "qualité de l'air et activité maritime"
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